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La maternelle aménagée version Blanquer

Publié le 29/01/2021

En décembre dernier est parue une note d’analyse et de propositions sur le programme d’enseignement de l’école maternelle, résultat d’un travail mené par le Conseil supérieur des programmes (CSP).

Mises en œuvre, ces propositions viendraient sérieusement bouleverser les programmes de 2015. Pour rappel, ceux-ci prennent en compte l’enfant dans sa globalité et sont construits dans le respect de l’élève de maternelle. Ils ont fait consensus, tant au niveau des professeur.es des écoles qu’au niveau des pédagogues et/ou inspecteur.rices de l’IEN.

Ce document de 50 pages retient essentiellement 3 chapitres : l’école maternelle : école du langage ; les nombres à l’école maternelle ; introduire quelques aspects des sciences. Rien sur les arts artistiques, ni sur l’activité physique, et encore moins sur le « vivre ensemble ». Cela est en totale contradiction avec les discours ministériels et les expériences mises en place ici et là dans certaines académies, comme les 30 minutes d’activité physique par jour à l’école.

Un retour à la primarisation ?

Le CSP rappelle pourtant : « L’école maternelle est l’école de l’épanouissement et du développement affectif et social de l’enfant. Elle offre ainsi à chaque enfant, considéré dans sa singularité, un cadre propice pour qu’il satisfasse son goût d’apprendre, devienne peu à peu un élève et aborde, dans les meilleures conditions, les premiers savoirs et savoir-faire scolaires ». Les attendus, énoncés dans la note, tant en français qu’en mathématiques, s’opposent totalement à ce qui est dit dans ce paragraphe.

La scolarisation à 3 ans devient prétexte à redéfinir les programmes de la maternelle. De fait, cette note insiste sur les savoirs fondamentaux que sont le « lire, écrire et compter ». Cela signe le risque de retourner à la primarisation que nous avons connue en 2008. Ainsi les attendus de fin de GS se rapprochent dangereusement du CP, tant en mathématiques qu’en français.

Quid du développement de l’enfant ?

Si être attentif.ves au langage de la ou du jeune enfant, à la prononciation, au vocabulaire, au développement de la conscience phonologique à travers des rimes des jeux est essentiel et primordial pour les professeur.es des écoles, il ne faut certainement pas aller jusqu’à l’enseignement précoce de la langue, des sons, des syllabes. Si en fin de GS, « tous les enfants doivent être capables de distinguer et de manipuler les syllabes d’un mot, les sons-voyelles, quelques sons-consonnes facilement identifiables », il est à craindre que les PS devront, dès leur rentrée, ingurgiter ces notions. Quid du développement affectif, social, du respect de l’enfant ?

Il en est de même en sciences, où la familiarisation avec les démarches d’ordre scientifique est préconisée. En mathématiques, un.e élève de GS devra « placer un nombre sur une ligne numérique » ; « compter à rebours de quatre unités à partir d’un nombre donné inférieur à 30 » ; « dire rapidement le nombre précédant ou le nombre suivant un nombre donné », etc.

L’école maternelle ne doit pas devenir l’école préélémentaire. Elle doit rester une école où l’élève s’épanouit, où elle.il se développe, tant au niveau social qu’affectif. L’école maternelle doit continuer d’être une école adaptée aux besoins, au rythme de chaque enfant.

Mise au point du CSP

Face aux réactions négatives, le CSP a publié début janvier un communiqué de presse dans lequel il estime que les critiques, émises après la publication de ses « propositions pour compléter et enrichir le programme en vigueur », reposent « sur des allégations mensongères ». Il ajoute : « Il faut absolument éviter de préparer les enfants de maternelle aux exercices des évaluations du CP » et « [la maternelle] ne doit en aucun cas être considérée comme l’antichambre de l’école élémentaire ».